Augustin Paluel-Marmont
Co-fondateur
MICHEL & AUGUSTIN
Jeudi 19 mars 2015
L’innovation dans un secteur traditionnel
Compte-rendu
Le 19 mars 2015, Le Club Les Echos en partenariat avec Kurt Salmon recevait le Co-fondateur de Michel et Augustin, Augustin Paluel-Marmont autour du thème : "L’innovation dans un secteur traditionnel"
Intervenants
Augustin Paluel-Marmont : Co-fondateur de Michel et Augustin
David Barroux : Rédacteur en chef des Echos
Henri Gibier : Directeur des développements éditoriaux des Echos
Laurent Chabert : Associé chez Kurt Salmon

Le parcours d’Augustin

Augustin est diplômé d’un Master à l’ESCP et d’un CAP boulangerie (il a aussi pris des cours de pâtisserie pris à la Mairie de Paris).

Après une première expérience au Club Med en tant qu’analyste puis chez Air France en marketing, il se lance dans la création d’un guide des 1262 boulangeries de Paris qui sera vendu à 12 000 exemplaires.

Mais son ambition depuis toujours est de créer une entreprise avec un copain d’enfance. Il pense alors à Michel (de Rovira, co-fondateur de Michel et Augustin), qu’il connaît depuis le collège.

Le constat

Ils partent d’un constat simple : aujourd’hui les produits alimentaires proposés aux consommateurs ont perdu en goût et en qualité. Les marques manipulent le consommateur par l’utilisation d’étiquettes compliquées. Ainsi 90% des produits à la vanille vendus ne contiennent pas de vanille.

L’idée 

Fort de ce constat, l’ambition de Michel et Augustin est alors de diffuser un état d’esprit par le biais d’une marque mondiale en se fondant sur deux idées principales :
  • Un marketing qui se base sur le fait de ne pas créer de marque mais plutôt de raconter une aventure
  • Un objectif majeur de remettre le goût au cœur des produits des préoccupations et de permettre aux consommateurs de comprendre ce qu’il mange
C’est ainsi que naissait l’idée de Michel et Augustin en septembre 2004.

La création de l’entreprise

Après avoir réalisé de nombreux essais de sablés dans la cuisine d’Augustin, les deux entrepreneurs réussissent à vendre leurs premiers biscuits dans le magasin du quartier (Salah) en décembre 2004. Ils continuent leur démarchage en faisant du porte à porte.
Peu à peu, les ventes augmentent et nécessitent un accroissement de la production. Un fournil, prêté par un ami, va leur permettre d’assurer cette fabrication dans un premier temps.

Puis, Michel et Augustin découvre le YOP et décide alors d’inventer un yaourt à boire avec du lait entier frais, peu de sucre et de vrais parfums. La vache à boire est née et deviendra un des best-sellers de la marque.

Le succès est alors au rendez-vous et implique un changement du modèle de l’entreprise : l’invention des produits reste en interne mais la fabrication est sous-traitée à des partenaires.

Mais comment innover dans un marché saturé ?

Le secteur de l’agroalimentaire est un marché saturé, avec des acteurs historiques bien installés, une croissance et des marges faibles où l’innovation est la seule manière de survivre (être le « first mover »).

Michel et Augustin basent alors leur survie sur 3 axes d’innovations :
  • Une innovation par la marque (« pas de marque » mais une aventure), soutenue par le développement des réseaux sociaux : l’entreprise est ici un média pour diffuser ses valeurs
  • Une innovation par le goût (avec la Mousse au chocolat, produit phare) et le format (révolution du yaourt à partager : la marque Michel et Augustin est leader sur le marché du pot de yaourt de 1kg)
  • Une innovation par le modèle économique : l’entreprise sous-traite la fabrication des produits (alors que tous les géants de l’agroalimentaire ont leurs usines en propre) et 90% de ses sous-traitants sont en France

Michel et Augustin aujourd’hui

C’est 90 personnes, une équipe jeune (30 ans en moyenne), peu de hiérarchie et une liberté d’entreprendre au sein de l’entreprise. C’est aussi une société ayant une croissance de 43%, une diffusion dans 21 pays et ayant réussi à lancer 25 produits en moyenne par an dans les dernières années.

Michel et Augustin est désormais détenu à 70% par Artemis, société appartenant au groupe Pinault et vise un objectif pour 2018, de 54 millions d’€ de chiffres d’affaires en France.

Avec l’ouverture d’une Bananeraie à Paris, puis à Lyon et désormais à New-York, l’entreprise souhaite aussi prolonger l’aventure à l’international.

Le secret de la réussite - comment innover concrètement?

L’innovation peut être portée par tous. Il faut tout d’abord être curieux mais aussi être sur le terrain (chez Michel et Augustin, les managers passent plus de 50% de leur temps sur le terrain).

L’utilisation d’une méthodologie de « screening » pour analyser les produits à lancer est un plus (phases de tests réalisées à la Bananeraie).

Grossir, mais à quel prix

Passer d’une production depuis la cuisine d’Augustin à une grande échelle fut l’un des premiers enjeux auxquels fut confrontée l’entreprise. La solution est passée par une co-innovation constante avec les partenaires/sous-traitants pour prendre en compte les contraintes industrielles. Les deux entrepreneurs ont réussi à développer un véritable savoir-faire de la sous-traitance qui leur permet aujourd’hui de viser un objectif de croissance avant un objectif de rentabilité et de limiter les effets de seuils.

Se confronter aux géants de l’agroalimentaire et à un marché aussi difficile fut aussi un des enjeux majeurs de l’entreprise. En effet, aujourd’hui dans le secteur, lorsqu’un nouveau produit est lancé et que la réception client n’est pas au rendez-vous, celui-ci est sorti des rayonnages. L’avantage de Michel et Augustin réside ici dans sa petite taille qui lui permet de se laisser le temps de réussir et d’améliorer en temps réel le mix produit. De plus, sa marque, qui est en soit une aventure, empêchent aujourd’hui de gros industriels de copier le modèle.

Mais comment conserver ses valeurs, son esprit atypique tout en grossissant ? Cela passe essentiellement par le recrutement : ce sont les personnes qui travaillent dans l’entreprise qui donne cette vision innovante. Les axes de recrutement chez M&A sont d’ailleurs les suivants : être sympa, passionné, ambitieux, brillant, malin, curieux et sincère.

Diriger sur la durée à deux semble aussi un challenge important. Mais l’envie de travailler avec un ami (de conserver un univers bienveillant et convivial) et la capacité à bien se répartir les rôles, par chantier (Augustin sur le marketing, les ventes, la RH et Michel sur la production, la logistique, et les relations actionnariales) permet d’assurer cet objectif commun.

L’entrepreneuriat en France aujourd’hui

Contrairement aux idées reçues, il n’est pas difficile d’entreprendre en France. Tout est une question de volonté. Les français restent tout de même un peuple dormant en la matière par rapport aux américains.

L’enjeu est ici d’inculquer cet esprit d’innovation/d’entreprendre aux jeunes français. Michel et Augustin organisent de nombreux témoignages dans les écoles. Pour eux, cette éducation passe aussi par l’engagement des entrepreneurs vis-à-vis de leur pays et leur volonté à prendre le micro et raconter leur aventure. Ce travail est à mener en collaboration avec les médias, pour relayer ces porte-paroles de l’entrepreneuriat à la française.


Par ML Chabert, Kurt Salmon
Club Débats - Augustin Paluel-Marmont
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